Encore plus incroyable que l’opposition Garry Kasparov / Deeper Blue en 1997, L’âge de faire vous présente, en exclusivité mondiale et interplanétaire, le match Nicolas Bérard / ChatGPT ! La règle : chacun doit rédiger un texte « d’environ 4 500 signes » traitant de la différence entre intelligence artificielle et intelligence humaine. Saurez-vous attribuer le bon texte à chacun ?
Et vous faire arbitre du match en désignant lequel des deux vous préférez ?
L’intelligence artificielle (IA) et l’intelligence humaine sont deux formes de cognition qui coexistent dans notre monde, chacune possédant des caractéristiques distinctes qui les différencient profondément. Comprendre ces différences est essentiel pour saisir le rôle unique de chaque type d’intelligence et leurs implications dans notre société. Dans cet article, nous allons explorer pourquoi l’IA et l’intelligence humaine sont si différentes.
– Origines et évolution : L’intelligence humaine est le produit de millions d’années d’évolution biologique. Notre cerveau, un organe incroyablement complexe, est constitué de milliards de neurones interconnectés. Au fil de l’évolution, l’homme a développé la capacité de résoudre des problèmes, d’apprendre, de s’adapter à l’environnement, et de développer des compétences sociales. L’intelligence humaine est étroitement liée à l’expérience personnelle et à la conscience de soi en tant qu’être humain.
En revanche, l’IA est une création humaine basée sur des algorithmes informatiques et des modèles mathématiques. Inspirée par le fonctionnement du cerveau humain, l’IA est libérée des contraintes biologiques. Issue de décennies de recherche en informatique, en apprentissage automatique et en traitement de données, l’IA évolue rapidement grâce aux avancées technologiques.
– Capacités et limitations : L’intelligence humaine est remarquablement polyvalente. Elle nous permet de résoudre une multitude de tâches, de comprendre le langage naturel, d’apprendre de nouvelles compétences, de raisonner, de ressentir des émotions et de faire preuve de créativité. Notre intelligence repose sur la conscience de soi, la compréhension contextuelle, et la capacité à appliquer des connaissances à des situations inconnues. Elle est caractérisée par une grande flexibilité, nous permettant de nous adapter à des environnements en constante évolution.
En revanche, l’IA est souvent conçue pour des tâches spécifiques. Elle excelle dans des domaines tels que la reconnaissance d’images, la traduction automatique, la classification de données et la prise de décisions basées sur des données. Cependant, elle est limitée à la tâche pour laquelle elle a été programmée ou entraînée. L’IA manque d’une compréhension profonde et d’une conscience de soi, et elle ne peut pas transférer ses compétences d’une tâche à l’autre sans réentraînement.
– Apprentissage et adaptation : L’intelligence humaine se caractérise par un apprentissage continu tout au long de la vie. Nous apprenons de l’expérience, de l’éducation, et de nos interactions sociales. Notre capacité à généraliser à partir de ce que nous avons appris nous permet de nous adapter à des situations nouvelles et inattendues. Nous pouvons également apprendre de nos erreurs et ajuster notre comportement en conséquence.
L’IA repose sur l’apprentissage automatique, qui consiste à exposer un système à des données pour qu’il identifie des schémas. Cependant, l’IA ne possède pas une véritable compréhension ni la capacité de généralisation propre à l’intelligence humaine. Elle ne peut pas apprendre de manière autonome en dehors des données auxquelles elle a été exposée, et elle ne s’adapte pas naturellement aux nouvelles situations sans réentraînement.
– Émotions et conscience : L’intelligence humaine est étroitement liée à la conscience de soi et à la gamme complexe d’émotions que nous pouvons ressentir. Du bonheur à la tristesse, de la colère à la peur, nos émotions influencent nos décisions et notre comportement. Notre conscience nous permet de réfléchir sur nous-mêmes, sur nos actions, et sur le monde qui nous entoure.
En revanche, l’IA est dépourvue de conscience et d’émotions. Les machines et les algorithmes d’IA traitent l’information de manière froide et objective. Elles sont incapables de ressentir des émotions ou d’avoir une expérience subjective du monde.
– Implications sociales et éthiques : Comprendre ces différences entre l’IA et l’intelligence humaine a des implications profondes pour notre société. L’IA offre des avantages en termes d’automatisation des tâches, d’efficacité et de prises de décision basées sur des données, mais elle soulève également des préoccupations éthiques. Les questions de biais algorithmique, de confidentialité des données et de contrôle des systèmes d’IA sont au cœur des débats actuels.
En fin de compte, l’intelligence humaine et l’IA sont complémentaires, chacune ayant ses propres forces et limites. Comprendre ces distinctions nous permet de tirer le meilleur parti de ces deux formes d’intelligence et de guider leur développement futur de manière responsable. Alors que la technologie de l’IA continue de progresser, il est essentiel que nous examinions comment elle peut servir au mieux l’humanité tout en respectant nos valeurs fondamentales.
Il fait quand même un peu flipper, le robot d’à côté, non ? Oui, je sais, je viens de foutre en l’air le jeu consistant à deviner qui (ou quoi) a écrit quel texte. La peur de perdre ? Peut-être. Bien heureusement, certains privilèges sont encore réservés aux humains, et j’utilise donc celui qui consiste à ne pas respecter les règles. Face à l’intelligence artificielle, je triche, donc je suis. J’espère que par une sorte d’esprit clanique, très chers lecteurs, très chères lectrices, que j’aime tant, vous allez immédiatement voter pour l’humain que je suis…
J’ai cependant décidé de ne pas abuser d’un autre de nos pouvoirs : la mauvaise foi. Je reconnais donc avoir été bluffé par les capacités de ChatGPT. Que je vous raconte : il ne lui a pas fallu une minute pour pondre le texte ci-contre, après que je lui ai donné l’ordre suivant (car dans l’histoire c’est quand même moi le patron) : « rédige-moi un texte d’environ 4 500 signes sur la distinction entre intelligence artificielle et intelligence humaine. » Dans l’arrière-cuisine, ses algorithmes ont commencé à mouliner, piocher, trier, croiser entre elles des milliards de données. Le temps de boire une gorgée de café et il avait déjà pondu le texte que vous pouvez lire ci-contre (vous sentez pas obligé·es, il est quand même très rébarbatif…).
Je me croyais malin, moi, avec la petite pile de bouquins posée sur mon bureau, les conférences regardées en ligne, les articles lus dans différents journaux, les entretiens avec des humains ayant bien voulu répondre à mes questions. Je vous jure que j’ai bossé, pour sauver l’honneur de notre espèce ! Pourtant, en termes de quantité, tout ce que j’ai potassé ne représente qu’une goutte d’eau dans l’océan des datas prises en compte par ChatGPT. Lui a à sa disposition environ 175 milliards de morceaux de données, et entre 1 000 et 2 000 milliards de mots ! Autrement dit, on pourrait s’y mettre à 7 – c’est-à-dire toute la valeureuse équipe de L’âge de faire –, à plein temps, pendant 1 mois, on n’aurait toujours pas collecté et intégré le millième des informations à disposition de ce foutu robot. Alors, on abandonne ? On remise les cerveaux et on laisse les clés du canard à une intelligence artificielle ?! L’âge de faire écrit par une IA, ce serait quand même le comble ! Rassurons-nous : sans prétention aucune, ChatGPT ne pourra jamais fabriquer un journal comme le nôtre, et cela pour plusieurs raisons, dont la principale est que l’intelligence artificielle n’a rien à voir avec l’intelligence humaine.
L’histoire de la partie d’échecs entre Garry Kasparov et Deeper Blue, gagnée par la machine en 1997, est en cela instructive. Pour beaucoup, quand Kasparov a couché son roi, c’est comme si l’humanité toute entière s’était agenouillée face à la machine, avouant la supériorité de l’intelligence artificielle. Il semble donc utile de rappeler que le champion russe a, certes, été battu par l’ordinateur, mais de justesse, face à un bouzin capable de calculer 200 millions de positions par seconde ! Tout génie des échecs qu’il est, Kasparov est absolument incapable d’une telle prouesse et, s’il a pu tenir tête à son adversaire, c’est bien parce que son esprit ne fonctionne pas comme un serveur informatique. D’ailleurs, notre brave Kasparov peut aussi jouer au foot, passer la serpillière, cuire des œufs, rire devant La Grande Vadrouille (on imagine…), chanter sous la pluie, tomber amoureux, se cogner le pied contre un coin de porte, se bricoler une attelle pour l’orteil qui le fait souffrir. Coincé dans son caisson d’acier, le taciturne Deeper Blue a subitement l’air très con. De la même manière, contrairement aux journalistes de L’âge de faire, ChatGPT n’ira jamais dénicher une petite asso installée au fin fond du Gers qui, parce qu’elle distribue des paniers bio aux familles démunies, qu’elle organise l’accueil de migrants ou qu’elle lutte contre un projet de mégabassine, rend le monde meilleur. La machine attendra que des humains mettent des infos sur la toile afin de leur piquer leurs infos. C’est du joli !
Et puis, il y a cette chose déterminante, soufflée par Miguel Benasayag : Deeper Blue calcule, mais contrairement à son adversaire humain, elle ne sait pas qu’elle joue… « Et alors ? », interrogent ceux qui aimeraient confier la gestion du monde à l’IA. Pour eux, la machine gagne la partie, et c’est là l’essentiel, car cela prouve sa supériorité. Or, l’essentiel, c’est au contraire de comprendre qu’elle ne sait pas qu’elle joue, qu’elle se contente donc de calculer, sans lever la tête de son algorithme. Froidement, méthodiquement, bêtement, elle calcule, réduisant le monde à des lignes de codes constituées de 1 et de 0. L’organisation algorithmique de la société se doit ainsi de tout intégrer dans des cases, de tout traduire en formules mathématiques – y compris ce qui ne peut pas l’être –, de faire disparaître le hasard et l’inattendu, d’ignorer tout sentiment. Cette « intelligence », à jamais inanimée, est par définition inhumaine. Alors que nous autres, on ne sait peut-être pas répondre spontanément à la question « combien font 254 122 x 4425 », mais nous sommes vivant·es, nous sommes humain·es, bordéliques et solidaires (votez pour moi), et prêt·es à en découdre avec l’IA si nécessaire ! Banzaï !
Solution : Nicolas Bérard a écrit le texte 2, ChatGPT a écrit le texte 1.