Par Henri Sterdyniak, Economiste atterré.
Les socialistes, et Marx le premier, ont toujours pensé que la révolution socialiste était avant tout le contrôle par les travailleurs eux-mêmes des moyens de production.
A l’origine, le projet socialiste n’a jamais consisté à laisser les capitalistes organiser à leur guise la production, puis à essayer de corriger, à la marge, la distribution des revenus, en prenant un peu aux plus riches et en donnant un peu aux plus pauvres.
Ce socialisme de distribution tient d’autant moins la route aujourd’hui, que les inégalités de revenus se développent au niveau des entreprises (puisque les capitalistes réclament des rentabilités fabuleuses et qu’ils rémunèrent grassement les dirigeants d’entreprise qui se consacrent à leur assurer cette rentabilité) ; que les riches acceptent de moins en moins d’être taxés (puisqu’ils peuvent choisir de s’installer dans un pays à faibles impôts) ; qu’ils acceptent de moins en moins de donner aux pauvres. Surtout, les grandes entreprises veulent mettre en concurrence les travailleurs du monde entier.
Elles développent un modèle de croissance qui crée de faux besoins parmi les privilégiés et ne satisfait pas les besoins essentiels des populations.
LE TRAVAILLEUR COLLECTIF
Malheureusement, le président Hollande a choisi la stratégie inverse de celle du socialisme de production : donner 35 milliards d’euros aux entreprises sans contrepartie, s’engager à réduire le pouvoir d’achat de la population (car, ces 35 milliards seront pris sur des dépenses sociales et sur des dépenses publiques qui profitent directement aux ménages), valider le discours patronal selon lequel c’est le droit du travail, les difficultés à licencier, l’obligation de consulter les salariés, qui brident la croissance, s’engager (en particulier par le Traité Transatlantique) (1) à réduire progressivement la réglementation des marchés, à laisser les grandes entreprises envahir tous les champs d’activité, à laisser le champ libre aux entrepreneurs avides.
Développer et orienter la production doit être au centre du combat socialiste, avec deux axes majeurs aujourd’hui. D’abord, changer l’entreprise pour faire participer les salariés aux décisions. Ceci suppose de reconnaitre que le fonctionnement et le développement de l’entreprise dépendent de l’effort et de la cohésion de l’ensemble de ses salariés. Il faut reconstituer le travailleur collectif, ce qui impose de réduire les inégalités de statuts et de revenus dans l’entreprise, de se donner comme objectif de développer les qualifications de chaque travailleur.
Le second est de mettre la transition écologique au centre du développement de chaque entreprise. Toutes les innovations ne sont pas bonnes à prendre : l’objectif ne doit plus être de développer à tout prix le profit (et même la production) de l’entreprise, mais de contribuer à satisfaire les besoins à moindre dommage écologique.
C’est cela aujourd’hui le socialisme de production.