S’il s’est passé quelque chose à Notre-Dame-des-Landes, c’est bien une incroyable mobilisation citoyenne. A ce sujet, on pense immédiatement aux zadistes et aux habitants qui, sur le terrain, ont empêché le démarrage des travaux. La zone humide sur laquelle doit se construire l’aéroport ne serait déjà plus qu’un lointain souvenir.
A Notre-Dame-des-Landes, depuis que les promoteurs ont été contraints de prendre leur mal en patience, les opposants ne se sont pas tourné les pouces. Ils ont d’abord obtenu du candidat François Hollande la promesse que les travaux ne débuteraient pas tant que toutes les procédures judiciaires ne seraient pas expirées. Et, ce faisant, ont profité de ce délai pour affiner leurs propres expertises et étudier les solutions alternatives. Ils se sont pour cela rassemblés au sein de l’Atelier citoyen pour le maintien et l’optimisation de Nantes-Atlantique – nom de l’actuel aéroport. Depuis plusieurs années, ils ne se contentent pas de la documentation qu’on veut bien leur soumettre. Des architectes, des experts, des politiques, des citoyens engagés… Le collectif s’est enrichi de forces aussi diverses que variées. « Aujourd’hui, on est à armes égales avec l’administration », se félicite Julien Durand, porte-parole de l’Acipa (1). Le 5 novembre, l’Atelier citoyen a sorti deux nouveaux « cahiers », parutions dans lesquelles le collectif présente ses études. L’un porte sur la possibilité de rénover la piste de Nantes-Atlantique, l’autre sur la possibilité de rénover son aérogare.
Agrandir l’aéroport actuel
Inutile de tourner autour du pot : dans un cas comme dans l’autre, le collectif conclut qu’il est préférable, tant sur le plan économique qu’écologique, de réaménager Nantes-Atlantique plutôt que de construire un nouvel aéroport. La piste, d’abord : les opposants expliquent, avec force détails, pourquoi « un simple resurfaçage, additionné de quelques mises en conformités, conviendra parfaitement, le tout pour un coût de 25 millions d’euros ». Une paille, si l’on compare cette somme avec celle avancée par la DGAC (2), qui estimait dans son étude que la piste devait être entièrement refaite, pour un coût de… 378 millions d’euros ! Or, les conclusions de l’Atelier citoyen n’ont rien de loufoque : il s’est notamment appuyé sur le travail d’un expert ayant travaillé à l’entretien de cette piste durant plus de trente ans.
L’aérogare ? Idem. En examinant le dossier de la DGAC, les opposants ont mis à jour quelques belles supercheries. Par exemple, la nécessité de construire une nouvelle aérogare se justifierait par la saturation de l’équipement actuel et l’impossibilité de le rénover à moindre coût. Les opposants ont alors effectué une simple comparaison entre le bâtiment existant et celui prévu à NDDL : la nouvelle aérogare serait plus petite que l’ancienne (3) ! Le projet dessiné par Vinci prévoit en effet 28 comptoirs d’enregistrement au maximum, alors que Nantes-Atlantique en compte 34. Quant aux salles d’embarquement, elles sont actuellement de 3 775 m2, alors que Vinci n’en prévoit que 2 850…
L’entêtement de l’Etat
« Ouf ! », se dit l’Etat, qui a failli avec le projet de NDDL claquer inutilement des centaines de millions d’euros tout en détruisant l’environnement ? Au contraire. Le 20 octobre, Manuel Valls réaffirmait ainsi « l’engagement du gouvernement et donc de l’Etat pour la mise en œuvre de ce projet ». Dix jours plus tard, le préfet de région des Pays de la Loire faisait savoir que « l’Etat a demandé aux maîtres d’ouvrage de la future plate-forme et de sa desserte routière de mettre en œuvre les démarches qui permettront de démarrer les travaux ». Des déclarations vécues comme des provocations par les opposants, qui restent donc particulièrement vigilants même s’ils ne croient guère à un lancement imminent des travaux. En attendant, ils réitèrent la proposition qu’ils ont formulée : qu’une étude réellement indépendante soit réalisée sur l’opportunité de construire NDDL, et ils se plieront à ses conclusions. L’Etat n’a pas l’air d’en vouloir, et préfère s’entêter à s’appuyer sur ses vieilles expertises.
Nicolas Bérard
1- Association citoyenne intercommunale des populations concernées par le projet d’aéroport.
2- Direction générale de l’aviation civile.
3- Suite aux révélations du Canard Enchaîné du 8 octobre 2014.