Jusqu’à présent, l’impact de la crise sanitaire sur les ménages a été atténué par les mesures gouvernementales, en particulier le chômage partiel, qui a évité une explosion du chômage. Toutefois, les salariés concernés ont souvent subi une baisse de 16% de leur salaire.
Les salariés précaires (CDD, intérim, salariés des sous-traitants, pseudo-autoentrepreneurs, étudiants) ont souvent perdu leur emploi. Les mois à venir risquent d’être marqués par les pertes d’emplois et la hausse du chômage, dont l’impact sera aggravé si le gouvernement impose sa réforme qui réduit les prestations chômage des salariés précaires. Par contre, en raison de taux d’intérêt très faibles, la Bourse s’est redressée. Certaines actions se sont même envolées (luxe, électronique, produits médicaux) de sorte que leurs propriétaires se sont enrichis malgré la crise. La crise a mis en évidence les disparités entre les travailleurs productifs (des soignantes aux ouvrières de l’industrie), mal payés, contraints d’être présents sur leur lieu de travail coûte que coûte et les personnes du haut de l’échelle, trop bien rémunérées, pour des emplois sans grande utilité sociale.
Inégalités de revenus… et de pouvoir
Il faut mieux protéger certaines catégories de la population particulièrement exposées aux chocs. Le développement de l’emploi précaire et de l’auto-entreprenariat doit être combattu. Le RSA doit être revalorisé, en particulier pour les familles avec enfants. Les jeunes de 18 à 25 ans, à la recherche d’un emploi, doivent bénéficier d’une allocation d’insertion, égale au RSA. Les bourses des étudiants doivent être revalorisées pour qu’ils se consacrent à temps plein à leurs études. Tous les chômeurs doivent recevoir une allocation, fonction de leur salaire de temps plein. En sens inverse, il faut réintroduire l’ISF, taxer les revenus financiers à l’impôt sur le revenu, ne pas baisser le taux de l’impôt sur les sociétés, bloquer les dividendes pendant la crise sanitaire. Surtout, la hiérarchie des salaires doit être mise en cause pour que ceux-ci correspondent à l’utilité sociale des emplois, ce qui implique la revalorisation des salaires des « premiers de corvée ».
Mais, les inégalités de pouvoir doivent, elles aussi, être remises en cause. Actuellement, les grandes entreprises et les classes dominantes déterminent l’évolution de la société. Leurs choix, menés par la recherche de la rentabilité financière, conduisent à une société en tension, foncièrement inégalitaire, mais aussi à la catastrophe écologique. Mettre en cause leur domination est nécessaire pour aller vers une société sobre, égalitaire, qui reprendra en main son destin. Cela nécessite de modifier les pouvoirs dans les grandes entreprises au profit des salariés et des citoyens et de changer leurs objectifs, qui doivent s’inscrire dans la planification écologique et sociale.
Henri Sterdyniak, économiste atterré