« La Honte ». Le mot revient souvent, ce 21 octobre, dans différents médias audiovisuels. La « honte », parce qu’un ancien président de la République, reconnu coupable d’association de malfaiteurs dans « l’affaire lybienne », se rend à la prison de la Santé pour y purger sa peine. La « honte » ne s’abat pas sur Nicolas Sarkozy : elle l’absout. Elle est pour les juges qui l’auraient « condamné sans preuves », et pour les journalistes qui auraient affabulé. Pour le mandat de dépôt, aussi, qui l’oblige à aller en prison alors qu’il fait appel de sa condamnation.
Le traitement médiatique de l’emprisonnement de Sarkozy est ubuesque. Pourquoi ces médias – d’autres le font – ne prennent pas le temps d’expliquer la décision des juges ? Pourquoi n’en profitent-ils pas pour rappeler le principe de l’égalité devant la justice ? Ou signaler, comme le fait Mediapart, que des mandats de dépôt sont prononcés dans 90 % des cas lorsque la peine prononcée dépasse 24 mois de prison – Sarkozy a écopé de 5 ans … L’auditrice d’Europe 1 et le téléspectateur de TF1 peuvent commencer par s’interroger : qui me parle ? La première est une radio rachetée par l’homme d’affaires d’extrême droite Vincent Bolloré, sur le yacht duquel Sarkozy avait passé ses vacances après son élection comme président.
La seconde est une télé détenue par le groupe Bouygues, dont le patron est un grand ami de Sarkozy. Qui détient les médias, comment se fabrique l’information, de quelle manière peut-on orienter l’opinion ? Notre société a, plus que jamais, besoin de recul vis-à-vis du système médiatique. L’âge de faire anime régulièrement des ateliers d’éducation aux médias , dans les écoles, collèges, lycées, médiathèques … Notre camarade Lisa Giachino invente ses propres outils, y réfléchit avec les enseignant·es… Mais voilà : « Y’a plus de budget. » C’est en substance ce que lui a répondu la Direction régionale des affaires culturelles (Drac), au moment de renouveler la subvention du ministère de la Culture touchée par la Scop pour cette activité (8 000 euros en 2025). Parce qu’on nous le répète assez : il n’y a plus de sous dans les caisses ! C’est la même logique qui menace de diminuer drastiquement le Fonds de soutien à l’expression radiophonique, destiné aux radios associatives locales. Et, de façon plus générale, les subventions à l’éducation populaire et à la jeunesse, aux ressourceries, à l’économie sociale et solidaire, au « fond vert » des collectivités… Pourtant, Bouygues et Bolloré, ils en ont à ne plus savoir qu’en faire, du fric. Pourquoi on leur en prendrait pas un peu ? Et pourquoi on ne parle pas de cette possibilité dans le(ur)s médias ?
Nicolas Bérard
Illustration : Journal du collège
de Volx, 2024
PS : Grâce à Marie, qui nous a envoyé des abonnements suspendus pour les prisons, Nicolas Sarkozy pourra nous lire à la bibliothèque de la Santé !









