Si l’expression « convergence des luttes » peut parfois sembler galvaudée, en soi l’idée est pragmatique et encourageante : les luttes sont plus fortes lorsqu’elles se soutiennent les unes les autres. Élargir notre angle de vue permet aussi d’anticiper « l’effet rebond » des victoires militantes. Car si on n’y prend pas garde, ce à quoi nous avons résisté quelque part risque simplement de se déplacer et de se faire ailleurs…
Soutenir les luttes amies et se réjouir de leurs réussites aide enfin à ne pas s’épuiser. Il y a tant à défendre, tant à refuser, tant à construire… Si on prend chaque question de façon isolée, on se sent vite dépassés et impuissantes.
La prochaine manif’ sur les retraites est prévue le 6 juin, les mobilisations sur l’eau se poursuivent… Et parmi le foisonnement d’actions organisées dans tout le pays, celle du 11 juin, à Nantes, est un bel exemple de convergence : elle fait le lien entre l’extension de carrières et le déplacement de l’hôpital. Si on laisse faire, l’Hôtel-Dieu et plusieurs bâtiments fonctionnels seraient détruits et l’hôpital reconstruit en quatre fois plus petit, sur l’île de Nantes. Comme l’explique le communiqué signé par six collectifs, c’est la même logique qui bétonne les terres agricoles, embourgeoise les centre villes en repoussant les moins riches vers la périphérie, réduit les services publics, libère du foncier rentable pour les promoteurs immobiliers, et extrait toujours plus de sable des carrières dans les villages de Loire-Atlantique « asservis par la métropolisation ».
Autre gros sujet : les autoroutes, contre lesquelles les actions se multiplient. Les 6 et 7 mai, 1 500 personnes ont installé une « Zad pour enfants », mélange d’aire de jeux et de parc d’accrobranche, sur le tracé du projet d’autoroute A133‑134, à l’est de Rouen. Des arbres ont été « armés » de clous et de filins afin de gêner les abattages.
À Strasbourg, l’association Alsace Nature a quant à elle obtenu le 12 mai l’annulation de l’autorisation environnementale accordée en 2019 par la préfecture pour réaliser une deux fois deux voies de 5 km, entre la commune de Châtenois et l’autoroute A35. Ce contournement impliquait de détruire plus de sept hectares de prairies, forêts et bords de cours d’eau. Le chantier a été suspendu alors qu’il était presque terminé.
Les promoteurs de cette double voie utilisaient comme arguments la dangerosité de la route actuelle et la pollution de l’air. Le tribunal a rétorqué qu’avec un seul accident par an entre 1996 et 2018, des travaux d’aménagement pourraient être suffisants, et que pour 90 % des riverains, le niveau d’exposition aux particules fines resterait le même.
Si la Collectivité européenne d’Alsace n’obtient pas gain de cause en appel, le projet devra reprendre ses démarches à zéro, avec tous les coûts que cela implique. « C’est un signal fort pour dire que maintenant la protection de l’environnement n’est pas une variable d’ajustement pour construire des routes », a souligné François Zind, avocat d’Alsace Nature.
En Guyane, des paysans ont besoin d’un coup de pouce. Ils se démènent pour protéger leurs terres face au groupe Séché, qui veut implanter une décharge « au cœur de notre zone agricole à Kourou, nous écrit un lecteur. Un quartier agricole qui s’est fait à la force du travail car les agriculteurs ont dû se débrouiller sans réseau d’eau potable ni d’électricité et une piste déplorable… Aujourd’hui que les produits sont vendus dans un circuit court, Séché essaye de tout détruire ». Pour aider les paysans de Kourou, vous pouvez participer à l’enquête publique jusqu’au 1er juin (1), et donner à la cagnotte créée pour financer les actions juridiques (2).
1 https://app.publilegal.fr/Enquetes_WEB/FR/EP23139/Accueil.awp
2 HelloAsso Wayabo
Lisa Giachino