Dans le film culte Un jour sans fin, Bill Murray campe un personnage enfermé dans une boucle temporelle. La même journée se reproduit systématiquement.
Les discours de Bruno Le Maire, Olivier Dussopt ou Pierre Moscovici nous enserrent dans une boucle temporelle. Le même propos idéologique est seriné depuis des années, ravivé par les conséquences économiques du Covid : les déficits publics ont dérapé, la dette publique a explosé, sa soutenabilité sera mise en cause si rien n’est fait. Conclusion présentée comme évidente et sans alternative : il faut diminuer les dépenses publiques.
Le quoiqu’il en coûte présidentiel aura fait long feu. Tout est en place pour organiser la future cure d’austérité. Quel meilleur exemple que celui offert par la composition de la commission Arthuis, chargée le 4 décembre par Jean Castex de réfléchir à la trajectoire future des dépenses publiques ? Quatre économistes en sont membres : deux ont exercé dans des banques d’affaires, l’une est membre de l’institut Montaigne (un think-tank ultra-libéral) et le dernier, ardent défenseur du projet d’union des marchés de capitaux dans l’Union européenne, a été conseiller de l’Eurogroupe et a joué un rôle clé dans l’imposition des plans d’ajustements qui ont dramatiquement appauvri la Grèce lors de la dernière décennie.
Le problème, c’est le néo-libéralisme
On apprécie Un jour sans fin parce que c’est drôle et cynique, parce que Murray ne répète pas les mêmes erreurs lorsque la journée redémarre et parce qu’à la fin, la boucle temporelle se brise.
L’Union européenne ne doit pas reproduire les mêmes erreurs que celles commises depuis 2010. Les politiques budgétaires récessives adoptées alors ont été désastreuses, entraînant la stagnation économique comme l’affaiblissement des services publics et des protections sociales.
Il n’y a aujourd’hui aucun risque lié à la soutenabilité de la dette publique, qui est émise à des taux nuls, voire négatifs. Il faut toutefois mettre en place des institutions la renforçant à long terme : la dépendance vis-à-vis des marchés financiers établie progressivement depuis les années 1970 doit être abolie ; la fiscalité doit devenir plus progressive (en particulier sur les très hauts revenus, les patrimoines, les entreprises multinationales), et plus écologique. L’État doit mettre en place des politiques industrielles, agricoles et d’investissement compatibles avec la transition écologique. Les services publics doivent être renforcés.
Il faut sortir du piège qui fait de la dette publique le problème majeur de nos économies. Le problème, c’est le néo-libéralisme. Il est plus que temps de rompre avec la boucle temporelle dans laquelle nous sommes enfermés.
Au sommaire du numéro 158
1 / EDITO Hercule contre Marcel / Robin et le jardin des bois
3 / Cinécyclo de la petite reine au grand écran
4 / Portrait : un pêcheur écolo en vaut deux
5 / Livre : Comprendre et détruire la mégamachine
/ Bonne bouffe pour tous à perpignan
6 / 7 Reportage en Italie : radio et tomates contre la mafia
12 /13 / Floppée de poèmes
14 / 15 / Actus : Cachez ces noirs que je ne saurais voir ! /
Grrondes : de la friture sur la 5G
16 /17 / La lorgnette
Coup de pouce vélo : l’entourloupe des certificats d’économie d’énergie
18 / L’atelier : au jardin / couture & Compagnie / cuisiner sans gluten / le coin naturopathie
19 / FORUM : Des lycéens poètes
20 / 21 Fiche pratique : peindre à la chaux
Dossier 4 pages : Quelques grammes de poésie
Dans ce monde de brutes, les mots nous sont plus que jamais nécessaires pour s’évader mais aussi se révéler, exploser, inventer… Certains jouent avec pour le plaisir, d’autres les sabotent pour se les réapproprier. Qu’ils l’écrivent, l’éditent ou la lisent, allons à la rencontre de celles et ceux qui ne voudraient pas vivre sans poésie.