Le miracle s’est donc accompli. Voici le Président Macron converti à l’écologie. Sous le soleil de Marseille devant une (petite) foule de chauds partisans, l’annonce en a été faite : le nouveau quinquennat sera celui de l’écologie ou ne sera pas !
La proclamation aussi forte qu’inattendue, a été faite entre deux tours d’élection présidentielle, mais, bien sûr, seuls les mauvais esprits peuvent voir là la main du calcul.
Comment en effet pourrait-on douter de la sincérité de ce président-là ? Ses engagements peuvent–ils être plus clairs ? Non seulement, c’est le premier ministre lui-même qui sera chargé de l’écologie, mais il sera épaulé par deux ministres « forts », (chargés respectivement de la « planification énergétique » et de la « planification écologique territoriale »). Car c’est dans la-planification-écologique, rien de moins, que l’on va entrer. Une expression ravie à un rival (Mélenchon et son équipe) qui en avait pourtant fait sa marque distinctive.
C’est qu’Emmanuel Macron a décidé de ne reculer devant rien. Pas même de procéder à la plus énorme triangulation de la campagne électorale actuelle, pour tenter de capter l’audience conquise par d’autres. Rien ne manque à cette opération puisque comme dans le programme de son rival (Mélenchon), c’est sur « l’initiative citoyenne » qu’il déclare vouloir s’appuyer.
Nucléaire et avion à hydrogène…
La triangulation tentée est d’autant plus stupéfiante que, en matière d’écologie, du côté Macron, tout avait déjà été décidé, ou presque. Macron candidat-président, il y a seulement quelques semaines, avait abattu ses cartes. L’écologie, ce sont d’abord des investissements massifs dans le nucléaire. C’est aussi l’avion à hydrogène, pour ne rien dire des mini-robots conçus pour passer entre les cultures afin de les débarrasser des parasites… Car, de fait, l’écologie selon Macron est un marché carbone étendu plus « des technologies de rupture ». Manière de ne toucher à rien du mode de production actuel, un mode de production qui est précisément celui qui a conduit à la situation catastrophique dans laquelle nous sommes.
Et que penser de la dimension « citoyenne » de l’action annoncée ? Qui en effet peut oublier le fait qu’après avoir engagé sa promesse de transmettre « sans filtres » les propositions de la Convention Citoyenne Climat, au parlement, il avait jeté l’ensemble au panier et fabriqué une loi « résilience climat » aussi incolore qu’inodore…
Revenons donc sur Terre. Dans quelques semaines, les élections passées, tout rentrera dans l’ordre. Nucléaire, avion à hydrogène et robots champêtres redeviendront les priorités du gouvernement.
Pour appuyer les mises en garde de la communauté scientifique (les rapports du GIEC), resteront « l’affaire du siècle », « Extinction rébellion », et autres « jeunes pour le climat », et leur action pour une énergie entièrement renouvelable à l’échéance du milieu du siècle. Préparons-nous, si ce n’est déjà fait, à rejoindre leurs mobilisations. Car, qui en doute, vraiment, notre espoir, ce sont eux qui le portent.
Benjamin Coriat, économiste atterré