On n’est pas là pour jouer les rabat-joie, alors, on ne va pas vous déprimer en énumérant les impacts écologiques de la fabrication des batteries électriques. On n’est pas là non plus pour semer la zizanie, alors, on ne s’étendra pas sur les bolides mal contrôlés qui rendent les pistes cyclables, en certains lieux et à certaines heures, impropres à la circulation des enfants.
On ne parlera pas non plus de l’esprit « toujours plus vite et toujours plus loin » qui pousse de plus en plus de personnes à passer du simple vélo à l’électrique. Non, non, non ! L’âge de faire est un journal « positif », qui se réjouit de voir des personnes laisser leur voiture au garage et prendre leur vélo électrique, sur des trajets trop longs pour être parcourus sans le coup de pouce de la batterie.
Mais quand même… Alors que les offices de tourisme élargissent leurs stocks de vélos à assistance pour répondre à l’engouement des vacanciers, et que les « start-up innovantes » préparent des vélos « encore plus connectés » (et toujours plus chers !) avec lesquels « vous pourrez discuter » (1), l’envie nous prend de reparler du plaisir de se propulser à la seule force du mollet, notre énergie transmise aux roues et démultipliée par le pédalier et les pignons. Ah, la bicyclette ! Quand elle a été inventée, aux XIXe siècle, c’était une formidable innovation. Aujourd’hui, c’est un objet accessible à tous, que l’on peut garder et réparer soi-même toute une vie, à moindre coût. Va-t-elle devenir ringarde ? Les fans de « l’innovation » en sont convaincus. « Le vélo électrique, ce sera comme les smartphones : les prix vont baisser au fur et à mesure que la production augmentera. » (2)
Nous, ringard pour ringard, on ne résiste pas à l’envie de citer la fameuse chanson interprétée par Yves Montand, qui dit si bien le mélange d’effort et de liberté apporté par le simple fait de pédaler à vélo :
« On était tous amoureux d’elle / On se sentait pousser des ailes
À bicyclette
Sur les petits chemins de terre / On a souvent vécu l’enfer
Pour ne pas mettre pied à terre
Devant Paulette
Faut dire qu’elle y mettait du cœur / C’était la fille du facteur
À bicyclette
Et depuis qu’elle avait huit ans / Elle avait fait en le suivant
Tous les chemins environnants
À bicyclette »
À l’été 2013, nous avions publié un dossier sur le voyage à vélo, émaillé de nombreux témoignages. Nicolas parlait du « plaisir de se déplacer à la force de ses jambes et de sa volonté ». Olivier nous disait : « Le vélo est une pause dans le temps. Cela me permet d’être cohérent avec mes idées, en me déplaçant sans brûler de carburant. »
Citons aussi Isabelle :
« Sur cette machine qui décuple nos forces, on a un sentiment de vélocité, on est grisé par la vitesse. C’est un excellent remède contre les débuts de dépression. À la différence du marcheur qui s’enfonce dans la terre, le cycliste marche sur l’air, en équilibre, comme sur un nuage. »
Mais trêve de poésie : pour pouvoir pédaler plus nombreux chaque jour, il va falloir exiger des aménagements plus complets et plus larges pour les cyclistes. Partout en France, des collectifs défendent la place du vélo, en ville et à la campagne, et font des propositions aux pouvoirs publics. Des ateliers de réparation nous invitent aussi à devenir autonomes pour entretenir notre bicyclette. (3) Si vous êtes en manque d’idées pour la rentrée, ces associations ont certainement besoin d’aide !
Lisa Giachino
1 – D’après Christophe Barza, patron de Firthy one bikes, sur www.franceinter.fr, le 9 août 2020, dans Après le confinement, l’irrésistible ascension du vélo.
2 – Selon l’entrepreneur Claude Droussent dans le même article.
3 – Recensés sur le site www.fub.fr
Numéro 154 – Septembre 2020
Psychiatrie, c’est grave docteur !
- EDITO Éloge du vélo non électrique
- Bricole solidaire dans les Hautes-Alpes
- Île d’Yeu une volaillère se bat pour installer sa ferme de poulets bio
- Entretien : du cœur au ventre contre les bombes atomiques
- Théâtre : une troupe d’enfants sur les planches / Livres : Vive la friche ! / Aliénation numérique
- Infographie : sauve qui pique pour le hérisson !
- Reportage : des familles d’accueil pour futurs chiens guides
- Actus : à la réunion, un plan de relance béton
- L’atelier au jardin / Couture & Compagnie cuisiner sans gluten / Le coin naturopathie /
- Fiches pratiques : bricoler un tunnel à empreintes / Construire un abri à hérisson
- Agenda / petites annonces / kiosque
Dossier 6 pages : Psychiatrie, c’est grave docteur !
Emprise des neurosciences, gestion néolibérale, enfermement, contention, médicaments… La psychiatrie perd son hospitalité et sa capacité à mettre en œuvre le soin relationnel. Il reste cependant des lieux qui échappent à cette transformation à marche forcée. On y pratique une psychiatrie humaniste, reposant sur l’écoute et la pratique de la psychothérapie institutionnelle. Mais jusqu’à quand ?