Avoir un toit est le premier besoin des familles. Le poids des dépenses de logement est particulièrement important pour les foyers les plus pauvres.
En moyenne, un ménage consacre 18% de son revenu à ses dépenses de logement, mais, pour les 25% de ménages les plus pauvres, ce taux atteint 27% pour les locataires du secteur social et même 41% pour les locataires du secteur privé.
Heureusement, ce taux d’effort est diminué par des allocations qui représentaient en 2016 une vingtaine de milliards d’euros, soit 1% du PIB, versées à 6,5 millions de ménages. Comme l’indique l’INSEE, les allocations logement sont la prestation sociale la plus redistributive, celle qui contribue le plus à réduire les inégalités de revenu.
Le montant des allocations logement versées en France est équivalent à celui versé au Royaume-Uni, un autre pays qui souffre de la cherté des loyers. La technocratie de Bercy est persuadée qu’il est possible de faire des économies importantes là-dessus. Elle prétend que ce sont ces allocations qui feraient augmenter les loyers, alors que la moitié des bénéficiaires sont dans un logement social, que 90 % des autres ont maintenant un loyer supérieur au plafond des allocations.
Ainsi Emmanuel Macron a-t-il déclaré : « La France dépense 40 milliards d’euros pour le logement. Nous avons 4 millions de mal-logés. Est-ce une politique efficace ? Non ». Il feint d’ignorer que les impôts sur le logement ont rapportés 62 milliards. Il ne met pas en cause les avantages fiscaux des investisseurs privés – avantages utilisés comme argument publicitaire par des officines de défiscalisation –, peu soucieux de satisfaire les besoins prioritaires.
Le logement locatif privé ne peut résoudre le problème des mal-logés puisque les propriétaires sélectionnent les locataires, refusent les personnes à faibles revenus, en emplois précaires, sans caution familiale.
« Réduction des loyers de solidarité »
En 2017, le gouvernement a arbitrairement décidé d’une baisse de 5 euros par mois des allocations logement, sous prétexte de garantir le passage de la France sous la barre des 3% de déficit public.
En 2018, il instaure une baisse de 50 euros des allocations pour les seuls locataires des HLM, sous le nom trompeur de « réduction des loyers de solidarité ». Par ailleurs, est annoncée la fin des allocations logement accession (qui facilitait l’accession à la propriété de familles modestes), la prise en compte du patrimoine des bénéficiaires dans le calcul des droits aux allocations, le gel de l’indexation des APL et la prise en compte des ressources de l’année courante.
Mesures qui, au total, devraient lui permettre de réduire de 3,2 milliards les dépenses annuelles d’allocation logement d’ici 2022. D’un côté, les ménages les plus pauvres verront s’accroître leurs difficultés financières. De l’autre, les HLM doivent diminuer leurs loyers pour compenser la baisse de l’APL pour leurs locataires bénéficiaires.
Cette baisse des ressources (1,7 milliards sur 2,6 de capacité d’autofinancement) pèse sur les sociétés d’HLM les plus pauvres, celles qui abritent les populations les plus défavorisées. Elle va nuire à leur capacité à entretenir et rénover les logements, en particulier du point de vue énergétique. La baise va freiner l’engagement des nouvelles constructions qui sont nécessaires pour améliorer la situation des 4 millions de mal-logés. C’est un coup direct contre les conditions de logement des familles les plus pauvres, qui nuit à leur capacité d’élever leurs enfants dans des conditions dignes.
Henri Sterdyniak, pour les Économistes Atterrés