Dans les dernières semaines, un projet et une déclaration ont alimenté le débat sur les prestations d’assistance.
Emmanuel Macron envisage d’imposer 15 à 20 heures d’activité aux titulaires du RSA. C’est un projet odieux. Les personnes qui, pour une raison ou une autre, ne peuvent assurer ces heures d’activité (femme avec enfants en bas âge, problème de santé ou de déplacement….) ne peuvent pas se voir priver de tout revenu. Dans l’immense majorité des cas, les personnes au RSA, recherchent un vrai emploi, pas une activité. Nul ne sait comment seraient organisées ces activités qui devraient concerner 1,8 million de personnes. Il ne serait pas concevable que les entreprises disposent ainsi d’une main d’œuvre gratuite. S’il s’agit d’un travail, il doit être rémunéré au moins au SMIC, avec les droits sociaux normaux. L’aide à l’insertion, la formation sont des droits des bénéficiaires du RSA, pas une obligation.
Opposer « la gauche des allocations » et « la gauche du travail », comme Fabien Roussel, est déplaisant. Les allocations chômage sont un acquis des travailleurs ; elles leur permettent de ne pas tomber dans la misère à la suite d’une perte d’emploi ; elles évitent qu’ils soient contraints d’accepter des emplois mal payés, avec de mauvaises conditions de travail ou ne correspondant pas à leur qualification. Même s’il est trop faible, le RSA assure à chacun d’avoir un revenu minimum. Il est conforme à l’article 11 du préambule de la Constitution de 1946 : « Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence ».
Pouvoir être fier de son travail
Mais, d’un autre point de vue, Roussel a raison. Les classes populaires sont celles qui produisent vraiment, celles qui dont le travail est indispensable. Les parasites, ce sont les classes dominantes qui vivent de rentes ou d’emplois bien rémunérés mais socialement inutiles. Les travailleurs doivent être fiers de leur travail, ce qui suppose des salaires et des conditions de travail décents, des possibilités d’évolution, un droit à intervenir dans le fonctionnement des entreprises. Les bénéficiaires du RSA ou des allocations chômage veulent avant tout un emploi, pas des allocations. Les travailleurs ayant perdu leur emploi ne doivent plus être laissés à eux-mêmes ; ils doivent bénéficier d’une formation rémunérée, d’un retour à l’emploi socialement organisé. Plutôt que verser des allocations, créer des emplois publics est indispensable dans la santé, la culture, l’éducation, la protection de la nature. Surtout, il ne faut pas se résigner de la disparition des emplois industriels, ce qui suppose (contre les dogmes européens) de mener une politique industrielle ciblée.
Henri Sterdyniak, Économiste atterré