Le Conseil constitutionnel l’a confirmé : il y aura un référendum sur la privatisation de l’entreprise Aéroports de Paris, si cette proposition recueille les signatures de 10 % des électeurs, soit 4,7 millions de personnes.
ADP a un quasi-monopole de l’accès en avion dans la région parisienne. Elle pourra imposer ses tarifs aux compagnies d’aviation, en particulier à Air France.
Certes, l’État aura théoriquement un droit de regard, mais l’utilisera-t-il ?
Les moyens de transport pour accéder aux aéroports, comme le contrôle douanier des passagers et des marchandises, incombent aux pouvoirs publics.
Faut-il que l’État prenne à sa charge les dépenses et une société privée les recettes ?
ADP possède d’importantes réserves foncières autour de Paris.
Est-il acceptable qu’elle décide de bétonner ses terrains, à l’encontre des nécessités de la transition écologique ?
En même temps, le gouvernement veut privatiser la Française des jeux, une entreprise particulière, qui ne doit pas avoir l’objectif de développer son activité mais doit au contraire éviter les jeux trop attractifs, lutter contre l’addiction des joueurs, lutter contre le blanchiment d’argent sale, ce qui est contradictoire avec la maximisation de son profit.
Une opération absurde
De point de vue financier, il s’agit d’une opération absurde. Les trois privatisations envisagées (ADP, La Française des jeux, Engie) rapporteraient 15 milliards; l’État en utiliserait 5 pour se désendetter et 10 milliards seraient placés par un fonds qui rapporterait 250 millions par an, lesquels financeraient « des innovations de rupture ».
Mais ces sociétés rapportent actuellement environ 1 milliard de bénéfices à l’État par an, soit une rentabilité de plus de 6 %.
Pourquoi les vendre pour placer le produit de la vente à 2,5 % ?
Par ailleurs, l’État peut aujourd’hui s’endetter sur dix ans à 0,3 % pour financer de grands programmes industriels. Nul besoin de vendre des bijoux de famille.
L’aéroport de Toulouse aurait dû servir de leçon : fallait-il confier une infrastructure vitale pour une région à une entreprise chinoise pirate, soucieuse avant tout d’en tirer un maximum de cash ? Comment expliquer de telles opérations ?
Des grandes entreprises comme Bouygues, Eiffage, Vinci, sont devenues des États dans l’État. Elles disposent de profits abondants, de capacités d’emprunts quasi illimitées, alors que l’État s’est appauvri en diminuant les cotisations sociales et les impôts sur les plus riches et sur les grandes entreprises.
L’État se retire pour leur laisser un champ d’action.Il leur confie les infrastructures publiques, comme il leur confie la culture ou le sport avec l’appel au mécénat. Ces privatisations marquent un renoncement de l’État.
Voilà pourquoi nous devrons nous mobiliser pour obtenir ces 4,7 millions de signatures. Afin de réaffirmer que l’État doit rester le garant du bien commun.
Henri Sterdyniak, économiste atterré
Au sommaire du numéro 143
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