L’urgente transition vers une société sobre et écologique pose la question du développement d’un travail vraiment utile et d’un emploi de qualité. Besoins insatisfaits partout, emploi de qualité presque nulle part : ce paradoxe du néolibéralisme n’est pas une fatalité, mais résulte de choix politiques. Pour y remédier, il est urgent de réduire le temps de travail (RTT) et de garantir l’emploi.
L’emploi est égal à la production divisée par la productivité du travail et par la durée du travail. Pour qu’il y ait croissance de l’emploi, la RTT doit être supérieure à l’écart entre la variation de la production et celle de la productivité horaire. La croissance économique ne crée de l’emploi que si elle est supérieure à la somme des variations de la productivité horaire et du temps de travail.
Le néolibéralisme réduit le temps de travail par le recours à l’emploi à temps partiel et aux bullshit jobs. À cela, il faut préférer des formes moins inégalitaires de RTT, comme la diminution de la durée hebdomadaire ou annuelle du travail ou sur l’ensemble de la vie active (congé formation, retraite) pour toute la population active.
Une garantie d’emploi
Cette RTT doit être combinée à une garantie d’emploi. Cette politique, inspirée d’Hyman Minsky (1), consiste à créer une garantie universelle, accessible à tous les actifs, en permanence. Ces emplois à temps choisi sont ouverts à toute personne majeure, désireuse de travailler. La rémunération comporte un salaire de référence, fixé en fonction des conditions de vie locales, un ensemble de prestations (services de santé, garde d’enfants, aide sociale, etc.) et du niveau de qualification du salarié. Les bénéficiaires de la garantie d’emploi peuvent suivre une formation de leur choix.
Pour s’adapter aux besoins locaux, la gestion des programmes de garantie d’emploi est fortement décentralisée. Le gouvernement contribue à la rémunération des employés en finançant une partie du coût en capital des projets financés, et les financements additionnels restent à la charge des collectivités locales et/ou des ONG impliquées. Cela permet d’impliquer tous les acteurs locaux (élus, entreprises, syndicats, habitants et surtout les chômeurs) et permet ainsi de faire vivre la démocratie locale.
Certains projets sont conçus de sorte à être pérennisés, les autres étant décidés de manière plus discrétionnaire lors des périodes de hausse du chômage. En France, le projet « territoire zéro chômeur de longue durée » constitue un pas vers une garantie d’emploi. Il faudrait que ce dispositif soit étendu à tout le territoire national et accessible à tous les chômeurs, quel que soit le moment depuis lequel ils sont en recherche d’emploi.
Dany Lang, Économiste atterré
1- Minsky H.P. (2016), Stabiliser une économie instable, 1986, éd. Les petits matins/institut veblen.