Le 21 juillet 2020, les gouvernements des pays de l’Union européenne (UE) se sont entendus sur un Plan de relance de 750 milliards d’euros. Ce plan représente-t-il vraiment un pas décisif vers une Europe plus solidaire et plus fédérale ?
La négociation a été longue et pénible. Les pays frugaux (menés par les Pays-Bas et l’Autriche, avec aussi la Suède, la Danemark, la Finlande), réticents à toute augmentation des transferts, ont obtenu en contrepartie un rabais de leur contribution au budget européen. L’Allemagne a conservé le sien. Plaisante solidarité…
Finalement, l’accord a pu se faire sur un plan de 750 milliards sur 3 ans, dont 77,5 milliards de programmes européens, 360 milliards de prêts et 312,5 milliards de subventions aux États membres, soit, hors prêts, 1% du PIB sur 2021-2023. C’est peu quand, en 2021, le PIB de l’UE devrait être inférieur de 5% à sa tendance d’avant crise. La quasi-totalité des mesures de relance se feront dans un cadre national. D’ailleurs, le Plan ne prévoit pas de grands projets pan-européens. Qu’on le regrette ou qu’on s’en réjouisse, le fédéralisme attendra.
Dans chaque pays, l’emploi de ces fonds devra figurer dans un « Plan pour la reprise et la résilience », qui devra s’inscrire dans les recommandations de la Commission et être approuvé par le Conseil. Le risque existe donc que la Commission et les pays frugaux ne conditionnent ces aides à des réformes libérales du marché du travail ou des retraites. Beaucoup de pays, soucieux de leur autonomie, pourraient refuser de demander des fonds (ainsi, seule l’Italie a demandé un prêt de 28,5 milliards sur les programmes européens de 2020 qui devraient représenter 340 milliards).
Impôts écologiques
Le Plan a cependant trois points favorables : il met en place un emprunt commun, qui pourrait permettre à l’avenir au budget européen de jouer un rôle contracyclique (qui inverse le cycle, Ndlr) et même de financer la transition écologique ; il envisage (mais à trop long terme) la mise en place d’impôts écologiques (sur le plastique, les émissions de carbone, les transactions financières, les Gafa) ; il renforce les objectifs de l’UE en matière de réduction des gaz à effet de serre (mais, sans dégager une trajectoire pour y parvenir).
Regrettons que la nécessité d’augmenter les déficits publics n’ait pas amené les instances européennes à déclarer que les dettes publiques des États-membres étaient garanties par la Banque centrale européenne (BCE), (ce qui aurait réduit l’écart de taux d’intérêt que supportent les pays du Sud), à renoncer au Pacte de stabilité (la menace n’est pas écartée que la Commission n’impose des politiques d’austérité après 2021) et à engager résolument la lutte contre les paradis fiscaux et réglementaires (y compris les Pays-Bas et l’Irlande).
Henri Sterdyniak, animateur des Économistes Atterrés.