L’administration est en train de créer un espace numérique de santé à chaque citoyen·ne, sans prendre la peine de recueillir son consentement. Ce fichier pose pourtant de sérieuses questions…
Le gouvernement aimerait attribuer un fichier numérique de santé à chaque citoyen·ne. C’est le programme « Mon Espace Santé » (MES), qui rassemblera le dossier médical complet du patient (ordonnances, résultats d’analyses, parcours vaccinal, etc.), une messagerie sécurisée, un agenda de rendez-vous et un panel d’applications liées à la santé. Grâce à ce nouveau fichier, « le patient est plus que jamais acteur de sa santé », chante le ministère de la Santé.
Des risques innombrables
Acteur, le patient ne l’est même pas pour créer cet espace santé. « Le gouvernement a choisi le passage en force : une création de dossier numérique automatique pour chaque Français·e sans consentement libre et éclairé ! », dénonce le syndicat de la médecine générale (SMG), opposé à ce programme. En effet, il n’est pas demandé l’avis du citoyen pour savoir s’il souhaite ou non ouvrir son MES. Tout juste reçoit-il un courriel pour l’informer de cette création. S’il le trouve dans sa boîte mail, qu’il l’ouvre et le lit attentivement, il y apprendra qu’il bénéficie d’un délai de 6 semaines pour s’opposer à son ouverture (voir démarche ci-contre). L’absence de réaction de sa part, en revanche, vaut consentement… « Passer outre le consentement des personnes au prétexte de “les aider” est la définition du paternalisme et, selon nous, s’oppose aux véritables pratiques de soin fondées sur l’écoute et la considération », pointe l’organisation La Quadrature du Net.
Autre problème majeur lié à ces dossiers numériques : la sensibilité des données qu’ils contiennent. Les seules exceptions prévues concernent les mineurs, qui partagent le même dossier que celui de leurs parents : les soignants seront autorisés à ne pas y inscrire certaines opérations, comme une interruption volontaire de grossesse. Pour le reste, sans même parler d’éventuels piratages informatiques, les risques sont innombrables… Plusieurs associations de personnes trans pointent par exemple celui de voir leur transsexualité exposée, « qu’on le veuille ou non, lors de toute consultation ou soin, même si ces derniers se trouvent sans lien avec la transition médicale du ou de la patient·e, comme une visite chez le dentiste ou le dermatologue ».
Nicolas Bérard