Recentrer le lieu de négociation là où l’employeur se trouve en position de force. Permettre à l’employeur de négocier directement avec les représentants du personnel. Faire sauter le « verrou » des syndicats.
Programmée pour être finalisée au cœur de l’été et imposée en bloc via la procédure des ordonnances. La refonte du droit du travail prévue par le gouvernement entend «rénover» le dialogue social, en étendant le champ des accords d’entreprise.
L’objectif est de permettre que l’accord d’entreprise puisse à la fois contourner les conventions collectives. Ainsi de redéfinir certaines caractéristiques du CDI (notamment les conditions de licenciement). Et même modifier les contrats de travail, avec à la clé la possibilité pour les employeurs de licencier tout salarié refusant ces accords.
Le gouvernement prétend que libéraliser les accords d’entreprise permettra de développer le dialogue social au plus près de la relation employeurs-salariés. En réalité, il s’agit de recentrer le lieu de négociation là où, précisément, l’employeur se trouve en position de force.
En effet, dans de très nombreuses entreprises, notamment les PME, s’il existe des délégués du personnel, il n’existe pas de représentants syndicaux.
Or, la loi impose que pour être valides ou soumis à référendum, les accords doivent non seulement être majoritaires, mais surtout signés par des organisations syndicales représentatives.
Ainsi, pour éviter de défavoriser les PME, le gouvernement envisage de simplifier la procédure en permettant à l’employeur de négocier directement avec les représentants du personnel ou de recourir à des référendums d’initiative patronale.
Le salarié n’est pas souverain
Dans les deux cas, il s’agit de faire sauter le « verrou » des syndicats. Mais permettre l’usage du référendum sans validation syndicale serait une manière de pervertir gravement la démocratie sociale. D’abord parce qu’à la différence des délégués du personnel, les syndicats sont les garants d’un intérêt général qui dépasse les seuls intérêts des salariés de l’entreprise. Ensuite, parce qu’un référendum d’entreprise ne peut être assimilé à un référendum citoyen. En effet, le salarié n’est pas souverain mais dans un lien de subordination.
Libre de licencier ou de décider de la fermeture d’un site, l’employeur pourra user du référendum comme d’un outil de chantage. L’exemple de Smart démontre en effet que la consultation des salariés n’est pas une garantie de protection.
En 2015, à la suite d’un référendum, les dirigeants étaient parvenus à faire accepter un retour aux 39h payés 37.
L’opposition des syndicats les avait néanmoins contraint à négocier avec chaque salarié pour modifier individuellement les contrats de travail. Le projet gouvernemental permettrait de court-circuiter cette opposition syndicale en faisant passer des accords d’entreprises contre leur avis.
Débarrassé des syndicats, le «dialogue social» risque alors de ressembler à un tête à tête de l’employeur avec lui-même.
David Cayla, des Économiste atterrés
Sommaire du numéro 121 – juillet / août :
- ÉDITO : Et la politique ?
- Solidarité à Calais
- Bagagerie solidaire
- Pose ton sac d’abord
- ENTRETIEN SCOP-TI : « EST-CE QU’ON VA TENIR LE TEMPS QU’IL FAUT ? »
- Documentaire LA SOCIALE
- LIVRE MANUEL DU BERGER D’ALPAGE
- Reportage : Handicap : sortir la tête de l’eau
- Infographie : “Sur Les chemins de Compostelle”
- LES ACTUALITÉS : Boues rouges « macron-compatibles » ?
- LA LORGNETTE : Quand Greenpeace sillonne les eaux africaines / Salaire à vie (part. 2)
- FICHES PRATIQUES
- DES LECTURES COLLECTIVES DE L’ÂGE DE FAIRE / FAIRE UN MUR VÉGÉTAL EN PALETTES