En psychiatrie, on passe après ! »« Parent pauvre de la médecine », les services psychiatriques ne sont pas prioritaires dans l’attribution des masques de protection. Une infirmière témoigne.
« On dit que la psychiatrie est le parent pauvre de la médecine… C’est toujours comme ça. Nos locaux sont vétustes. Et là, pour les masques, on passe après ! » Sandrine (1) est infirmière dans un hôpital psychiatrique de Dijon où plusieurs cas de Corona Virus ont été détectés parmi les patients et le personnel soignant.
Le 3 mars, on nous a donné deux boîtes de 50 masques. Quand des mesures ont été prises en fin de semaine pour protéger la population, on s’est dit qu’on allait peut-être nous aussi avoir les moyens de se protéger et protéger nos patients. Mais non ! On nous a dit de porter un masque seulement si on est malades. C’est marche ou crève. En salle de relève, on est les unes à côté des autres, sans distance de protection !
Sandrine et d’autres employés de l’hôpital psychiatrique ont fait remonter leur mécontentement auprès de la direction, qui a interpellé l’Agence régionale de santé. « D’après ce que l’on sait, les masques ont été donnés en priorité au CHU, indique l’infirmière. Notre directeur essaie de voir avec des mairies, car certaines auraient gardé des stocks prévus pour les élections. »
« Des patients répètent que l’on est en guerre »
En attendant, certains fabriquent eux-mêmes des masques en s’inspirant de tutoriels trouvés sur internet. Avec du papier absorbant, du scotch et deux rubans, ou avec du tissu… « Je n’avais pas de sopalin au boulot alors j’ai testé le papier crépon, mais ce n’était pas terrible », dit Sandrine.
D’autres conservent, bien plus longtemps qu’il ne le faudrait, le masque obtenu il y a plusieurs jours. « On ne dirait pas qu’on est dans un pays riche ! »
Les arrêts maladie sont nombreux, de la part de personnes à la santé fragile, qui ne veulent pas risquer de contaminer un proche, ou tout simplement trop angoissées par le climat anxiogène.
Les gens ont peur. On ne se sent pas en sécurité. D’ailleurs, ce n’est pas étonnant : si vous regardez la télé, on dirait que c’est la fin du monde !
Dans son service, qui accueille des personnes atteintes de gros troubles mentaux, l’atmosphère s’en ressent.
Les patients ont écouté Macron et répètent que l’on est en guerre. Certains sont très délirants et parlent de la guerre de cent ans ! Le fait de respecter des distances, de ne plus serrer la main, crée aussi des angoisses car ils sont souvent très tactiles. Et puis, il y a ceux qui portent un masque parce qu’ils toussent… et qui l’enlèvent pour tousser !
LG
(1) Le prénom a été changé.